J’ai entretenu, ou plutôt commencé à entretenir une relation nouvelle à la photographie grâce à de récentes avancées (toutes personnelles) en impression. Je vous partage une première aventure.
Je travaille presque exclusivement avec un XT4 de Fujifilm. Mon autre appareil, un Canon 550d converti à l’infrarouge, collecte la poussière à la suite de mon déménagement. J’espère que j’aurais l’occasion d’écrire à son sujet.
Mais c’est surtout la possession d’une epson ET-8550 qui m’a permis d’échapper à l’ennui de l’exposition de mes photos à l’exposition digitale. Cette acquisition, je l’ai faite au cours de mon diplôme pour imprimer en grande quantité, notamment des photos. J’ai ainsi pu réaliser une grande variété d’impression, notamment un travail cartographique sur papier transfert. J’ai évidemment pu imprimer un ensemble de photographies, majoritairement en format 10*15, sur le papier photo qui est pour moi une norme, l’ILFORD Papier Galerie Prestige Smooth 310g. Il est relativement bon marché, et ressemble beaucoup à ce qu’on peut attendre d’un labo, avec un grammage qui rend la photographie un poil plus intéressantes que les archives de Mamie.

Mais voilà tout le problème : si une photographie ne vaut que les conditions dans lesquelles elle est présentée, il faut absolument encadrer une 10*15 pour qu’elle ait un minimum de prestance. Si l’universalité de ce format permet une mise à plat des photographies, je trouve que mes photographies faisant dans les détails – à l’opposé de celles qui popent! par une composition ou un travail de couleur particulier – souffrent beaucoup d’un effet d’anodisation. Ainsi, j’ai souvent tendance à les considérer comme des souvenirs de vacances et à les mettre de côté. J’aime bien les stocker dans mes boites qui sont en fait des archives personnelles, mais j’aime aller au-delà.
Ce qui nous amène à l’autre partie de ce récit : j’écris aussi, et j’aime écrire physiquement, dans des carnets. Ce qui amène une certaine consommation de papier, que j’ai eu pour habitude de satisfaire à muji. Mais je cherche une meilleure option, surtout du fait de la qualité du papier Muji qui me semble un peu trop plastique pour un stylo plume. J’ai donc aperçu, à Rougier&Plé, dans le 6ème un carnet Hahnemühle destiné au travail pour fusain. Mais la couverture rigide, ainsi que la qualité du papier, notamment pas son épaisseur, sa couleur (très) légèrement crémée et le prix tout à fait raisonnable (5€90) m’a poussé à l’acheter. Finalement, ma plume n’avait pas la moitié du débit nécéssaire pour satisfaire la soif du papier, et après quelques prises de notes subies, j’ai décidé d’expérimenter en impression sur celui-ci.
La qualité du papier m’a au premier abord paru assez équilibré pour tenter d’imprimer à très faible densité et écrire des notes, pour des cartes d’anniversaires. J’ai donc imprimé un petit ensemble de photos, et j’ai complété avec mes mots à la main. J’ai fait ça assez mal, puisque j’ai imprimé, écris, puis ré-imprimé, ce qui a constitué une heureuse découverte, mais aussi des imperfections de réalisation dans un ensemble plastique déjà un peu chargé. J’ai répété l’opération, pliant et dépliant (au lieu d’imprimer en recto-verso) et scotchant. Si les manœuvres que j’ai entrepris sont incompréhensibles et illogiques, puisque toute à fait inutile, elles m’ont permis de prendre confiance en l’imprimante et en sa capacité à imprimer sur des ensembles très hétéroclites. Je crois que les personnes qui ont reçu mes cartes en sont plutôt contentes.

Deux semaines et un voyage plus tard, je me suis trouvé à fouiller des photos de l’espace, probablement frappé par la fascination de Tillmans pour ces réalisations. Je me suis donc précipité sur les probables ressources en open-access de l’ESA, mais je me suis trouvé face à un site particulièrement fouillis (je ne me permettrait pas de jeter la pierre) ainsi qu’un besoin d’authentification pour télécharger les images en haute résolution. Je me suis donc dirigé vers un possible sous-domaine consacré aux photos de Thomas Pesquet, mais je suis surtout tombé face à son magistral flickr, abreuvé par une très grande variété de photos. J’ai choisi d’ignorer les photos du quotidien d’un spationaute, et je me suis cantonné à trois grandes catégories qui sont les photos « satellites », les photos planètes, et les photos des engins spatiaux. Le travail de curation n’était pas du tout compliqué, bien que je ne me sois donné de limite que le nombre de feuilles de mon carnet (qui, après que j’ai réalisé qu’il n’y avait pas tant de pages que ça, ne semble plus être une si bonne affaire).
C’est donc l’impression qui était un peu fastidieuse, surtout dans la mesure où j’ai dû décrocher un grand nombre de pages, couper les fils, enlever la colle, en bref saboter le travail de reliure. Le résultat est irrégulier, car il consiste en de nombreux hors formats du fait de la différence de taille à cause du regroupement puis de la découpe de pages dans des booklets. Le résultat est assez inégal, car la colle accroche assez bien est n’est pas toujours complètement enlevable. L’impression peut sembler en suite un peu retord, car la colle et où les petites déchirures peuvent bourrer la machine. Mais n’en faisons pas tout un plat, car une fois le profil de l’impression cuisiné, ce n’est pas tant l’impression que l’avant et l’après qui sont longs. C’est donc le contraste, le léger décalage de couleur à opérer et surtout la quantité d’encre par point que la buse crache qu’il faut régler. Le risque est surtout que le papier gondole beaucoup ! Le rendement a été assez bon, car j’ai eu de la chance sur les premiers réglages, et j’ai dû perdre quelques feuilles entre les déchirures et les bourrages papiers.

N’ayant pas le luxe de posséder un électrospectrogramme permettant une reproduction fidèle des couleurs, je préfère considérer l’impression comme étant la partie chimique de ma photographie : le hasard a beaucoup été diminué par la technologie pour la photographie jusqu’au fichier numérique, et c’est la granularité, la non-maîtrise des possibilités colorimétriques du papier, la granularité de celui-ci ainsi que le hors format qui donne un assortiment de feuilles assez uniques.
L’installation aussi a été fastidieuse, car j’ai voulu utiliser du double face au lieu du scotch de peintre pour aplatir les feuilles qui, comme je l’ai déjà dit, sont un peu granuleuses. J’ai fini le tout avec un poil de fixateur pour éviter que l’encre qui me restait un peu sur les doigts soit endommagée. J’ai essayé de respecter un ensemble de tri entre les photos pour les regrouper par thèmes. J’ai choisi ce mur car j’aime le dégradé de jaune qu’il produit. Je regrette un peu qu’il soit exposé en face du nord car il ne reçoit que de la lumière indirecte, ce qui sera bon pour sa conservation, mais moins bon pour son appréciation.




